Je vous retrouve aujourd’hui pour un épisode focus produit ! La région Auvergne Rhône-Alpes tient l’histoire de son patrimoine culturel aussi grâce à ses produits qui en sont les représentants.
Quand je vous parle de marques et produits typiques je pense par exemple à la marque Giraudet, historiquement à Bourg-en-Bresse qui commercialise des quenelles fraîches typiques de Lyon. Je vous parle de toutes les AOP et IGP qui font partie de la richesse de la région comme les noix de Grenoble, la crème de marron de l’Ardèche, le Beaufort, Le Reblochon, les poires de Savoie et bien d’autres !
Alors aujourd’hui je mets le focus plus précisément sur la liqueur de Chartreuse qui a une histoire tumultueuse et une fabrication toujours secrète !
Un peu de géographie: le massif de la Chartreuse
Le massif de la chartreuse est ce que ça vous parle? La région c’est aussi ses massifs emblématiques comme les Aravis, les bauges, la Vanoise et la Maurienne pour ne citer qu’eux.
Il se situe entre Chambéry, Grenoble et Voiron. Le massif de la chartreuse est assez reconnaissable, puisque celui-ci est délimité au sud et côté Est par la vallée de l’Isère, par son côté sud-est par la combe du Grésivaudan, et à gauche, par Grenoble, qui délimite la Chartreuse et le Vercors.
Le côté nord, quant à lui, est séparé des Bauges par la ville de Chambéry. Mais pourquoi je vous raconte tout ça ? Je trouve que c’est toujours intéressant de situer un peu le contexte car ces caractéristiques géologiques font partie intégrantes du thème du jour.
Si vous me suivez depuis plusieurs semaines, vous devez savoir que je parle de bonnes adresses, mais aussi de nos produits locaux. Et quand on parle du massif de la chartreuse, on pense évidemment à la liqueur de Chartreuse, produit local emblématique, réalisé dans le fameux monastère.
L’histoire de la liqueur de Chartreuse
Tout commence en 1084, Bruno et ses 6 compagnons connus sous l’ordre des Chartreux, décident d’établir leur quartier dans le désert de Chartreuse et érigent alors un ermitage pour vivre reclus et en communauté. Reclus veut dire aussi que l’autosuffisance devait être de mise. Ils deviennent donc tout à tour éleveurs, pisciculteurs, exploiteurs de forêt et enfin maîtres de forges.
Pendant les 700 ans qui suivirent, l’ordre à dû faire face à de nombreuses catastrophes. Avalanche, huit incendies et enfin la peste. Au 18e siècle, c’est au tour de la révolution française et cela aura pour conséquences de chasser l’Ordre hors de la France.
C’est là aussi que le célèbre breuvage arrive. À la fin du 18e, cet élixir de santé est vendu dans des flacons à dos d’ânes sur les marchés de Grenoble et de Chambéry. Les chartreux subiront encore plusieurs gros conflits politiques qui ont marqué l’histoire mais aussi la perte de leur manuscrit qui contenait la fabrication de l’élixir..
En 1816 le breuvage est réalisé de nouveau grâce à un petit alambic et les chartreux réalisaient également à ce moment du dentifrice “le spécifique” contre les maux de dents et des sirops.
En 1825 l’élixir de table ou de santé arrive après 8 années de travail et de test. Cette liqueur a des vertus médicinales ce qui sera fort utile pendant l’épidémie de Choléra qui arrivera quelques années plus tard.
En 1838, une liqueur de mélisse de couleur blanche voit le jour et fait place à une liqueur jaune, la Chartreuse jaune plus douce à 43° puis la Chartreuse verte à 60° (ah oui ca dépote!) en 1840.
La marque naît enfin et sera commercialisée sous le nom de Liqueur vendue à la Grande Chartreuse. Elle connaît grâce à ses liqueurs et élixirs de santé un beau succès et les soldats présents dans le massif en 1848 vont y contribuer grâce au bouche à oreille. Et comme pour aujourd’hui, ce succès attire les convoitises et contrefaçons et c’est là que les étiquettes seront collées pour signifier sa fabrication et son authenticité.
Après une deuxième expulsion et l’obligation pour les moines de faire leurs produits en dehors de la France début 1900, ils réussissent 20 ans plus tard à installer une distillerie à Marseille et leur renommée est grandissante. La liqueur sera d’ailleurs citée dans le roman Gatsby le magnifique en 1925.
Quelques années plus tard, la compagnie française de la grande chartreuse récupère son bien sur le site de Fourvoirie et leur marque qu’ils avaient perdu lors de leur expulsion. Après plusieurs années de travaux pour remettre en état les lieux, la production peut enfin reprendre !
Mais de nouveau, pas de chance ! Et c’est le moins que l’on puisse dire, car la chartreuse subit un glissement de terrain qui emporte toutes les installations. Face à cette énième tragédie, tout le monde se mobilise et aide les Chartreux à établir leur production quelques mois plus tard sur Voiron.
Je vous passe les détails de toutes les péripéties que la marque a dû connaître. En effet, lorsqu’ils ont été chassés hors de la France pour la deuxième fois, ils ont installé leur distillerie en Espagne et celle-ci a dû faire face aux bombardements de la seconde guerre mondiale.
Ils ne retrouveront le chemin du monastère qu’en 1940 et feront évoluer l’image de la marque Chartreuse en 1950, qui profitera des 30 glorieuses pour se développer. Je vous partage sur le blog les différentes photos des étiquettes au cours des années.
Cette marque, la Chartreuse maintenant, est le symbole parfait de la résilience. Des conflits et catastrophes ils en auront connus, entre catastrophes naturelles, incendies, maladies, conflits politiques, révolutions, guerre, crises économiques et effets de mode. Mais malgré tout, 900 ans plus tard, la marque est toujours bien présente et elle aura su s’adapter au fur et à mesure de son histoire.
La fabrication de la Chartreuse
Sa fabrication est un secret gardée précieusement par seulement 3 personnes au Monastère de la Grande Chartreuse. Tout ce que l’on sait, c’est que la formule secrète contient quelque 130 plantes, fleurs, écorces, racines et épices.
Elle a, de ce que l’on sait, une fabrication qui va durer plusieurs semaines entre les moutures élaborées dans la salle des plantes au monastère. Sa distillation pour obtenir son arôme, et enfin différentes macérations pour extraire les principes actifs des plantes et obtenir sa couleur naturelle. Elle va enfin vieillir et se bonifier un peu comme du vin dans un foudre de chêne (un gros tonneau, plus gros qu’un fût) pour développer ses arômes et ce qui continuera même après sa mise en bouteille.
De nos jours vous pourrez retrouver la Chartreuse jaune et verte ainsi que l’Elixir végétal de la Grande Chartreuse qui sont les liqueurs historiques, un peu partout du moment que l’on trouvera des vins et spiritueux. Mais aussi des produits dérivés comme les tisanes ou les bonbons.
Comment déguster la Chartreuse ?
Il est coutume de déguster la Chartreuse jaune comme un digestif. On la consomme fraîche à 12-13° ou alors avec des glaçons. Pour l’elixir de Chartreuse, on l’ajoutera avec parcimonie dans les tisanes, grog et cocktails. Mais aussi pur sur une cuillère à café, en versant quelques gouttes sur un sucre ou alors dans une tasse d’eau en cas de maux de tête, malaise ou de périodes de règles. Et enfin la Chartreuse verte, en digestif servi frais, dans des cocktails ou en cuisine !
Comment cuisiner avec de la Chartreuse!
Voilà un passage qui me parle ! Comment cuisiner la Chartreuse ?
Personnellement c’est typiquement le genre d’ingrédients que je peux cuisiner dans des recettes sucrées comme si c’était un arôme. À la place de mettre de la vanille, de l’arôme d’orange ou d’amande amère, on ajoutera à la place de la chartreuse pour donner un arrière goût de plante subtil. On pourra en ajouter dans des crêpes, pancakes, gaufres, gâteaux, crèmes ou entremets.
L’alcool s’évapore après cuisson ?
Pour terminer ce podcast, à la question est-ce que l’alcool s’évapore après la cuisson, la réponse est Non.
Je vous avoue que j’étais étonnée de cette réponse; mais selon Futura Science, un site sérieux, l’alcool ne s’évapore pas complètement. Si on déglace par exemple des oignons avec de l’alcool, il restera 85% d’alcool. Si on cuit un gâteau avec un peu de chartreuse pendant 25 min il restera 45% et ça descend à 35% après 55 minutes de cuisson.
Ce taux baissera encore avec 10% d’alcool restant après 2h de cuisson, et visiblement même avec 3h de cuisson il en restera encore un peu. En tout état de cause, cela dépendra aussi de son exposition à l’air. Plus le plat sera grand, plus l’alcool sera exposé à l’air, et ses molécules s’échapperont.
J’espère que cet épisode vous à plus ! Si vous aimez la région et que vous souhaitez que je parle en détail d’une ville, de bonnes adresses, de produits ou d’une personnalité de la région qui pourrait correspondre au podcast, laissez moi un commentaire, mail ou avis et ça me donnera, je suis sûr, des idées pour la suite !
Merci pour tous vos retours sur mon dernier épisode sur les mythes et légendes et visiblement c’est Myrtille que vous avez le plus aimé ! Rendez-vous semaine prochaine pour la suite de Saveurs et découvertes !
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